Munich, sommet de la course aux armements

La conférence annuel sur la sécurité qui a lieu chaque année à la mi février dans la capitale bavaroise et a réuni quelques 500 sommités du monde occidental, s’est placé en 2024 sous le signe d’une fuite en avant va-t-en guerre orchestré par l’UE et l’Otan.

Le sommet annuel de Munich sur la sécurité s’est déroulé ces 16 et 17 février 2024 en présence du gratin de la politique et des plus gros producteurs d’armes de la planète occidentale. Le chef de l’Otan, Jens Stoltenberg, a une nouvelle insisté sur la nécessité de monter en puissance dans la fabrication d’armes et de livrer à l’Ukraine jusqu’aux plus sophistiquées d’entre elles, comme les drones, les missiles ou les avions de combat F-16.

Quelque 500 personnalités occidentales de premier plan y ont participé. Parmi lesquelles la plus forte délégation est venue des États-Unis, avec à sa tête la vice-présidente Kamala Harris et le secrétaire d’État Antony Blinken. 

Pour les Européens, les chefs d’État en personne ont fait généralement le déplacement. En termes d’invitations, un effort particulier avait été déployé à l’endroit du dit Sud global, réputé trop distant à l’égard de la mobilisation militaire occidentale. Mais en vain, car peu de dirigeants de pays émergents ont fait le déplacement. À l’exception du ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, venu, semble-t-il, surtout en position d’observateur.

« victoire-de-Kiev-sinon-rien »

Les doutes et les inquiétudes quant à la viabilité de la stratégie développée par Washington et ses alliés de l’UE visant une « victoire-de-Kiev-sinon-rien » sont montés d’un cran, compte tenu de l’enlisement de la situation sur la ligne de front. Cela n’a pas empêché le président ukrainien Volodymyr Zelinsky, de plaider ce17 février à Munich pour ,le maintien de ce cap, comme «  enjeu de civilisation pour toute l’Europe ». En dépit des morts et des souffrances infligées à des dizaines de milliers de soldats russes et ukrainiens dans les tranchées, il n’y aurait, ont renchéri Washington et l’Otan, pas d’autre solution qu’une fuite en avant belliciste. 

Les quelques plans de paix impliquant l’ONU, avancés en 2023 par Brasilia, Pékin ou Djakarta, ont été bien vite traités par le mépris. Si l’on s’abstient d’un effort de guerre conséquent, prévient Jens Stoltenberg, promptement suivi par la Commission européenne, l’Europe risque de se retrouver en position de faiblesse dans un conflit direct avec la Russie, présenté désormais comme un scénario quasi inévitable d’ici cinq à dix ans.

L’UE n’aurait donc point d’autre choix que de se surarmer. Donald Trump avait donné le ton sur une estrade électorale, la semaine passée, en menaçant de retirer le parapluie états-unien en cas d’attaque russe aux mauvais payeurs qui n’auraient pas fait l’effort de porter leur budget militaire à 2 % de leur PIB. Un coup de pression supplémentaire pour les incorrigibles qui oseraient encore s’aventurer en dehors des clous des normes de l’Alliance atlantique.

« Davos de la défense »

Bon élève de l’Otan, la France, avec sa loi de programmation militaire à 400 milliards d’euros sur la période 2024-2030, devrait être au cœur de discussions ardues portant sur une mise à disposition de sa force de frappe nucléaire à l’ensemble de l’UE. 

Emmanuel Macron, qui a concédé lors d’un récent voyage en Suède qu’il en irait de «  la responsabilité de la France », est très attendu sur la question. «  Nous avons besoin de la dissuasion. Et elle inclut les armes nucléaires », a lancé le président du groupe du Parti populaire européen au Parlement de Strasbourg, l’Allemand de la CSU, Manfred Weber. Il plaide depuis quelques semaines dans la presse outre-Rhin pour que Paris transfère ses capacités nucléaires à l’UE. Comme sa collègue, Katarina Barley, vice-présidente de l’Assemblée de l’UE et tête de liste du SPD du chancelier Scholz aux prochaines européennes.

La conférence de Munich se revendique comme une sorte de « Davos de la défense ». Résultat d’initiatives strictement privées, elle se finance sur la base d’un sponsoring de multinationales d’origine allemande ou occidentales, au sein desquelles les géants de l’armement possèdent une place de choix, comme l’états-unien Lockheed Martin, fabricant des chasseurs bombardiers furtifs F-35, ou l’allemand Rheinmetall, producteur des chars Leopard, et devenu en l’espace de quelques mois l’une des « valeurs » vedettes de la Bourse de Francfort.

Les participants à la manifestation pacifiste de ce samedi 17 février figurent parmi les rares protagonistes à alerter sur cette dimension de la conférence. Ils ont prévu d’enserrer l’hôtel Bayerischer Hof, où sont réunis sommités politiques et PDG, pour dénoncer les risques d’une déflagration interimpérialiste que font courir ces formidables accumulations d’armes, du côté de Washington et de ses alliés comme du côté russe. Ce qui ne fait que révéler l’urgence de promouvoir la paix en résistant à la banalisation en marche de ces stratégies va-t-en-guerre.

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