« Votre guerre sans nous », les jeunes allemands en grève contre la conscription

La loi rétablissant la logique d’un service militaire, introduite à la suite d’une mise en condition alarmiste de l’opinion sur l’imminence d’un conflit avec la Russie, suscite un très fort mouvement de résistance dans la rue et les établissements scolaires du pays.

La guerre n’est pas leur avenir.. Des dizaines de milliers de jeunes allemands l’ont fait entendre très fort en descendant dans la rue et en participant à une « grève des écoles contre la conscription» dans près d’une centaine de villes. Au même moment ce vendredi 5 décembre le Bundestag adoptait une loi sur la conscription de tous les jeunes gens et des jeunes filles qui le souhaitent. La démarche restera certes initialement « volontaire » souligne  le gouvernement CDU/SPD du chancelier Friedrich Merz mais il se fait fort de rétablir un service militaire obligatoire ou à tout le moins « un tirage au sort » parmi les conscrits pour atteindre l’objectif d’une armée de 460.000 soldat(e) s qui « doit , selon le chancelier, devenir la première d’Europe ».

A Coblence le jeune Leo Reinemann (18 ans)  porte-parole de l’Alliance des élèves en grève, dénonce au micro de la télévision publique régionale une volonté « de vouloir nous faire plonger dans les tranchées »  alors qu’au même moment les investissements « dans la formation, les infrastructures scolaires sont dérisoires et nos programmes d’enseignement vieillots »  

Interpellé sur la peur d’une guerre qui se répandrait dans la population et le besoin d’y faire face , martelés par le gouvernement et les medias dominants, le jeune-homme  rétorque sans hésiter : « je suis convaincu que l’on n’empêche pas les guerres par la course aux armements mais qu’au contraire c’est celle-ci qui les déclenche.. »

Les résultats d’un sondage auprès des jeunes allemands de 18 à 29 ans est venu doucher quelque peu l’enthousiasme des partisans d’une Allemagne puissance dotée « des capacités à faire la guerre » comme le dit le ministre de la défense, Boris Pistorius ( SPD). Quelques 63% des personnes interrogées dans cette tranche d’âge se déclare en effet « hostiles à l’instauration d’un service militaire. »

A Berlin place de la porte de Halle où se sont rassemblés les écoliers et lycéens grévistes, s’est vite avérée trop petite pour contenir la foule des jeunes gens . Ils étaient plus de 10.000 selon les organisateurs. Monté à la tribune Hans, un jeune garçon âgé de  16 ans, s’est exclamé  les politiciens qui ont voté la loi, « ne sont pas les nôtres. Pas un sou ne doit aller à leur surarmement.» Une enseignante d’un établissement d’enseignement professionnel qui accompagnait ses élèves dont bon nombre sont issus de l’immigration, s’est exclamé pointant les réflexions racistes formulées par le chancelier sur le sujet en octobre dernier : « Il ne veulent pas de vous dans l’image urbaine du pays. Mais il faudrait que vous soyez prêts à mourir pour l’Allemagne

Parmi les formations représentées dans le Bundestag seule Die Linke a affirmé « une solidarité pleine et entières » avec les jeunes grévistes et  manifestants. « La jeunesse a besoin de perspectives, de logements abordables et pas d’un passage obligé par un service militaire » relève Maximilian Schirmer , président de Die Linke à Berlin   « Le gouvernement dépense sans compter pour Rhein Metall et les géants de l’armement. Et maintenant il veut impliquer les jeunes dans sa politique mortifère », dénonce Désirée Becker, pour le groupe parlementaire de Die Linke au Bundestag. 

A Hambourg plus de 5000 jeunes ont défilé derrière une banderole géante : « votre guerre, sans nous ». Et comme pour préciser la détermination des manifestants à rebours du discours officiel : « Personne ne peut t’obliger à croire à leurs mensonges alarmistes sur les menaces ». Ou un peu plus loin : «  tes intérêts n’ont rien à voir avec ceux des profiteurs de guerre. »  Leo Damman, l’un des dirigeants De Die Linke sur place voit dans cette mobilisation « le signal fort d’une jeunesse politisée et à la conscience de classe aiguisée. »    

Dans le grand estuaire de l’Elbe, comme à Berlin ou à Coblence Die Linke est la seule formation présente au sein du Bundestag à déployer son soutien et force drapeaux contre la conscription.  La direction du SPD a passé outre les objections de son aile pacifiste, regroupé au sein du « Manifeste » ( voir l’humanité du 15 juillet) ; Quant aux verts ils sont, au nom d’un soutien indéfectible à l’Ukraine et d’une mobilisation contre les autocraties, sur l’une des lignes les plus bellicistes du parlement qui jure avec leur propre ADN, eux qui sont nés de la résistance civile au déploiement des missiles états-uniens Pershing en Allemagne dans les années 1980.

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