L’extrême droite a de nouveau fortement progressé dimanche 1er septembre dans les Länder du Brandebourg et de Saxe où elle a disputé les premiers rôles à la CDU comme au SPD en rassemblant un quart des suffrages.
Les résultats des scrutins régionaux se suivent et se ressemblent pour les deux partis au pouvoir sous la houlette de la chancelière Angela Merkel. L’un et l’autre ont à nouveau décroché de façon spectaculaire. Après avoir dirigé la Saxe sans interruption depuis la réunification avec des scores initialement très supérieurs à la majorité absolue, la CDU n’a plus rassemblé que 32,1% dans le scrutin régional du dimanche 1er septembre (contre 39,4% encore en 2014). Dans le Brandebourg le partenaire SPD du gouvernement fédéral connaît un affaissement du même type. A 26,2%, il a enregistré près de 6 points de chute par rapport à 2014 (31,9%).
Même si les partis des ministre-présidents sortants, le CDU Michael Kretschmer en Saxe et le SPD Dietmar Woidke dans le Brandenbourg, parviennent à se maintenir en tête dans leur Land respectif. Ils sont désormais talonnés par l’AfD qui obtient respectivement 27,5% (+ 17,7%) en Saxe, son meilleur score dans une élection régionale, et 23,5 % (+11,3%) dans le Brandebourg. Les tractations pour leur reconduction à la tête du gouvernement régional promettent d’être difficiles. Les coalitions sortantes, CDU/SPD en Saxe et SPD/Die Linke dans le Brandenbourg, sont désormais en effet largement minoritaires. De difficiles négociations pour intégrer les verts aux exécutifs régionaux sortants sont annoncées.
Quand ils n’étaient pas la force dominante l’affaissement des deux « grands » partis est plus net encore. Le SPD décline à 7,7% en Saxe et la CDU perd près de 8 points dans le Brandenbourg. (15,6 % contre 23% en 2014).
Surfant sur le populisme et la xénophobie l’AFD est parvenue à détourner un immense malaise accumulé dans ces territoires d’Allemagne orientale sur trois décennies depuis une «réunification » pratiquée sous l’entière houlette des Konzerne, les grands groupes ouest-allemands, qui ont pu s’installer en régnant par le vide. Et en développant une précarité endémique.
Die Linke, traditionnellement bien implantée à l’Est, s’est employée à démasquer les véritables racines du mécontentement populaire et du discours de haine de l’AfD. En vain hélas puisque la formation enregistre également un recul considérable: elle obtient 10,4% en Saxe (- 8,4%) et 10,7% dans le Brandebourg (- 7,9 %). Outre l’AfD, seuls les verts progressent mais de modeste façon en réalisant respectivement 10,8% dans le Brandebourg (contre 6,5% en 2014) et 8,6 % en Saxe (+ 2,9%).
Signe supplémentaire de la gravité du désarroi régional, Andreas Kalbitz et Jörg Urban, leaders respectifs de l’extrême droite dans le Brandebourg et en Saxe font partie de « L’aile » (Der Flügel), la tendance la plus nationaliste radicale au sein de l’AfD, celle qui ne rechigne pas à flirter avec les groupuscules néonazis ou le mouvement contre l’islamisation de l’occident (Pegida) basé d’ailleurs à Dresde dans la capitale de la Saxe.
Cette nouvelle secousse tellurique ne devrait pas manquer d’ébranler toujours davantage une grande coalition nationale déjà très mal-en-point. Les dissensions internes au sein des deux ex grands partis promettent de s’aiguiser. Ainsi une aile droite nationaliste qui n’a cessé de gagner en influence au sein de la CDU, va-t-elle sans-doute renforcer encore sa pression en faveur d’une alliance avec l’extrême droite.
Mais pour une chancelière Angela Merkel, en bout de course, qui a d’ores et déjà annoncé qu’elle ne se représenterait pas en 2021, le plus gros sujet de préoccupation vient d’un SPD toujours plus proche de la rupture. Son nouveau recul électoral confirme une tendance observée à chaque scrutin régional, et il ne va pas manquer de conforter dans le parti ceux qui contestent le bienfondé de l’alliance gouvernementale avec la CDU.
Le SPD est donné désormais, selon les sondages au plan national, entre 13% et 15 % des intentions de vote. Soit exactement au même niveau que l’AfD. Si la convocation d’une élection anticipée du Bundestag apparaît, de ce fait, risquée aux yeux de tous les membres du parti, les contestataires font valoir qu’un prolongement de la participation au gouvernement ne ferait qu’alimenter cette descente aux enfers. Et ils plaident pour « un tournant à gauche », seul moyen d’arrêter l’hémorragie électorale.
Sans tête après la démission d’Andrea Nahles au printemps dernier, suite, déjà à un résultat électoral désastreux, le parti s’est donné jusqu’à un congrès extraordinaire début décembre pour retrouver une direction et clarifier sa ligne. L’issue des débats s’annonce incertaine.