Anniversaire de la chute du mur : Derrière les flonflons de la kermesse

Malgré la débauche d’initiatives musicales du gouvernement allemand la ferveur populaire est restée contenue ce 9 novembre, la méthode choisie pour la réunification ayant laissé un goût amer à l’Est comme à l’Ouest.

Un lâché de 8000 ballons lumineux, disposés sur l’emplacement exact de l’ancien mur, a constitué hier soir le clou des célébrations du 25ème anniversaire de sa chute. Angela Merkel et son gouvernement ont voulu en faire une fête populaire en convoquant force chanteurs et groupes musicaux de l’époque et d’aujourd’hui. D’évidence il s’agissait d’échapper aux critiques des cérémonies du 20ème anniversaire pour lesquelles avaient été convoqué le gotha des chefs d’Etats de la planète, avec des fastes alors inversement proportionnels au niveau de ferveur manifestée par la population. Si l’on veut bien regarder derrière les flonflons de la kermesse du week-end cette donne là n’a pas franchement changé.

Un très grand nombre d’Ossis (allemands de l’est) mais aussi de « Wessis » (allemands de l’ouest) conservent en effet de bonnes raisons de ne pas trop extérioriser leur joie. Car la réunification souffre d’un défaut de naissance majeur: Helmut Kohl, alors chancelier d’Allemagne de l’Ouest, a choisi avec l’accord tacite des capitales « occidentales», la voie de l’adhésion à la République fédérale (RFA) de nouveaux Länder (recréés spécialement pour l’occasion à l’Est) plutôt que celle de la convocation d’une assemblée constituante – comme le réclamaient les manifestants de la première heure dans les rues des villes est-allemandes – pour mettre à plat démocratiquement les structures d’une nouvelle Allemagne. Le « vainqueur » de la guerre froide choisissait ainsi d’annexer, de fait, les territoires de l’ex RDA à la RFA, leur imposant toutes ses normes. Les grands groupes ouest allemands ont pu ainsi se saisir des quelques pépites de l’industrie est-allemande et liquider le reste. D’où une explosion du chômage, une migration massive dont l’Allemagne orientale n’est toujours pas remise. Les salaires y restent souvent inférieurs à ceux de l’Ouest et une grande précarité continue d’y étendre ses ravages.

Ironie du sort, les Wessis ont été touchés eux aussi, un peu plus tard, par une réunification qui a servi de laboratoire aux déréglementations du vieux système rhénan dont les standards salariaux et sociaux étaient, de loin , les meilleurs d’Europe occidentale. Gerhard Schröder a achevé ce processus visant à une mise aux normes libérales anglosaxonnes. Paradoxe de ce «modèle allemand» là, devenu le carcan référentiel de toute l’UE, il est très impopulaire outre Rhin avec son cortège de souffrances sociales, sur fond de financiarisation de l’économie. 25 ans plus tard le pays réuni est devenu socialement et territorialement plus inégalitaire que ne l’a jamais été la vieille République fédérale.

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