Merkel marquée par les nationaux-libéraux allemands



La chancelière a fait un pas vers plus de solidarité européenne mais sous surveillance d’une mouvance monétariste et nationaliste qui déborde largement des rangs de l’extrême droite anti-euro (paru dans l’humanité du 27 mai 2020).

En prenant l’initiative d’un plan de soutien ­financé par un fonds spécifique du budget européen, Angela Merkel a lancé avec Paris une initiative teintée d’une certaine dose de solidarité européenne. Celle-ci était si peu effective jusqu’ici, en dépit des immenses besoins surgis avec la crise économique et sanitaire, que pouvait émerger la crainte d’un inexorable délitement de l’Union européenne (UE). Il fallait donc trouver les moyens de préserver le modèle ordolibéral européen. Mais c’est moins avec Emmanuel Macron qu’avec une mouvance nationale-libérale, très influente chez elle, que Merkel a dû passer un compromis pour y parvenir.

Une partie de la classe dirigeante allemande, influente jusqu’au sein des partis chrétiens-démocrates (CDU-CSU) de la chancelière, refuse depuis des années que l’Europe puisse se transformer en une « Union de transferts ». Entendez qu’elle se dote d’un mécanisme obligeant les États les plus riches à soutenir les plus pauvres. L’arrêt de la Cour ­constitutionnelle de ­Karlsruhe, le 6 mai, contestant le bien-fondé des rachats de dettes d’État par la Banque centrale européenne, fut l’un des révélateurs de la dimension de ce clivage intra-allemand.

En intégrant un fonds de relance au budget de l’UE, Merkel fait un pas vers plus de solidarité européenne. Mais elle pointe aussi que les éventuelles dotations budgétaires accordées aux pays les plus touchés seront « sous contrôle » de la Commission pour éviter que l’Allemagne, qui est logiquement le plus gros contributeur net au budget de l’UE, ne soit amenée à transférer trop d’argent vers les zones les plus sinistrées du continent.

Initialement, les ténors de l’AfD, l’extrême droite anti-euro, furent les seuls à monter au créneau, reprochant à la chancelière rien moins que de vouloir « faire les poches des Allemands » pour alimenter « une gabegie » de deniers publics dont seraient coutumiers les pays du sud de l’Europe. Mais des dissonances se manifestent maintenant au sein de son propre parti. L’aile économique (Wirtschaftsflügel) de la CDU est intervenue le lundi 25 mai en exigeant que des « lignes rouges » soient établies pour l’utilisation du fonds ad hoc prévu par le plan Merkel-Macron. Celui-ci doit « soutenir la croissance européenne après la crise du coronavirus, et non l’entraver avec de nouvelles montagnes de dettes », prévient Carsten Linnemann, qui est aussi vice-président du groupe CDU au Bundestag.

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